L'enquête de l'association de consommateurs UFC-Que Choisir sur le prix de l'eau, rendue publique le 29 octobre 2007 et qui a eu un considérable retentissement médiatique, comporte de graves erreurs de calcul et ses résultats ne sont pas crédibles", a dénoncé, lundi 19 novembre, lors d'une conférence de presse, Bernard Guirkinger, président de la Fédération professionnelle des entreprises de l'eau (FP2E) et PDG de la Lyonnaise des eaux (groupe Suez), qui estime que "l'UFC a voulu jeter l'opprobre sur toute la profession".
La FP2E conteste la méthode consistant à calculer un prix de revient théorique du mètre cube (m3) d'eau, à partir de données issues de rapports publics divers, et à le comparer au prix facturé aux usagers, pour conclure que les écarts constatés aboutissent à des "bénéfices faramineux" de 43 % à Nancy, 56 % à Lyon, 61 % en Ile-de-France, 67 % à Marseille.
"Il est faux de prétendre qu'il s'agit de bénéfices. Notre marge se situe plutôt autour de 7 %", argumente M. Guirkinger : "L'UFC a sous-estimé nombre de dépenses, notamment d'analyses de la qualité de l'eau, d'assurances, d'impôts et surtout de frais de personnels, qu'elle a carrément divisés par deux. Depuis la loi Mazeaud du 8 février 1995, les comptes des 9 000 collectivités locales qui font appel à nos entreprises sont publics et la plupart d'entre elles font réaliser des audits de nos prestations par des experts indépendants, au moins tous les cinq ans, dans le cadre de la clause de renégociation des contrats."
"Tous les calculs sont consultables sur notre site Internet et s'appuient sur des rapports publics", rétorque François Carlier, directeur adjoint de l'UFC-Que Choisir, chargé des études : "Ce sont effectivement des prix que nous avons reconstitués, sans nous fier à ces fameux "comptes annuels", documents peu détaillés et qui reprennent les sommes facturées par les distributeurs aux communes, celles-là mêmes que nous contestons."
Dans son enquête, l'UFC avait décerné un satisfecit à quatre villes, Clermont-Ferrand, Annecy, Chambéry et Grenoble, dont le taux de marge, selon ses calculs, va de 10 % à 20 %, avec un prix de revient théorique de 0,76 euro le m3. "Il est logique que l'eau soit moins chère dans ces villes de montagne, où elle est abondante et n'a pas besoin d'être traitée", fait remarquer Antoine Frerot, vice-président de la FP2E, "tandis que les villes mal classées, comme Lyon, Gennevilliers, Marseille et les communes d'Ile-de-France, avec de prétendues marges supérieures à 50 %, arriveraient à un coût théorique de 0,57 euro le m3, bien inférieur, alors qu'elles puisent, elles, dans des rivières polluées, ce qui nécessite de coûteux traitements. Cela montre, à notre avis, l'incohérence de cette étude."
L'UFC assure avoir tenu compte des coûts de traitement de la ressource, mais "plus que le coût du traitement des eaux, ce qui est déterminant dans le prix du m3, c'est la densité de l'habitat et l'entretien des 830 000 kilomètres de canalisations. Dans les zones rurales, comme l'Allier ou la Manche, il faut entretenir et réparer 25 à 30 mètres de canalisation par habitant, contre seulement 2 à 3 mètres, en ville", détaille M. Carlier : "C'est la raison pour laquelle notre coût théorique est moins élevé dans les zones urbaines", conclut-il.
L'UFC fait valoir qu'à la suite de l'enquête 2006, trois villes, Paris, Angers et Annecy, ont ouvert leurs livres de comptes à ses enquêteurs et invite d'ailleurs toutes les collectivités locales et leurs partenaires à faire part, sur le site de l'association, de leurs remarques. Les distributeurs en appellent, eux, au ministre de l'écologie et du développement durable pour organiser un débat sur le coût de ce service public : "D'accord ! Confrontons nos chiffres", réplique l'UFC-Que Choisir.
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