Une enquête interne a été ouverte par La Poste à la suite de l'initiative d'un facteur creusois, qui avait rendu des services à des personnes isolées au cours de sa tournée en leur portant pain, cigarettes ou journaux.
Dernièrement, Laurent Mallard, 42 ans, facteur de Royère-de-Vassivière, en Creuse, était accompagné dans sa tournée sur le plateau de Millevaches par un organisateur-analyste chargé « d'évaluer en temps la durée des tournées et de les optimiser.
Postier depuis une dizaine d'années après avoir débuté sa carrière en région parisienne, Laurent Mallard, sans doute imprégné d'un trop grand sens du service public, n'aime rien de mieux que de donner des coups de main aux habitants, agriculteurs retraités, per-sonnes âgées, souvent privées de moyen de locomotion et vivant dans un habitat dispersé.
Ce jour-là, le facteur remit donc à l'un deux paquets de tabac, à l'autre deux journaux. « Ce peut être une baguette de pain ou des médicaments ramenés de la pharmacie, mais je ne tonds pas encore la pelouse », dit-il avec humour. Mal lui en a pris : ses audacieux gestes de soutien ont provoqué un rapport défavorable et il a été convoqué par la directrice du bureau de Bourganeuf. L'emploi du postier ne semble pas menacé, mais il pourrait subir une sanction. Un procès-verbal pourrait être rédigé à son encontre.
La population du paisible bourg qui s'étend sur 7 500 hectares s'est émue et a lancé une pétition. « Le facteur est le seul lien avec l'extérieur dans nos campagnes. Je trouve scandaleux qu'un inspecteur vienne rompre cette tradition d'entraide », s'insurge Anne-Marie Reyre, maire. En Creuse, d'où était parti naguère un mouvement de défense du service public, l'affaire est prise, si l'on peut dire, au pied de la lettre.
« Il s'agit d'une incompréhension et d'une simple divergence de vues entre le postier et l'inspecteur », minimise Jean-François Parsol, directeur du courrier en Limousin. La Poste, assure-t-il, ne remet nullement en cause le rôle social du facteur. Une fonction qui serait même selon lui « plus que jamais confortée par un investissement de 700 millions pour les 100 000 facteurs qui se traduisent par de nouveaux matériels, de nouveaux locaux, de nouveaux métiers. »
Abasourdi, Francis Laveix, un habitant du village, rappelle que La Poste distribuait il n'y a pas si longtemps un ouvrage en deux tomes, « Facteur en France », vantant le rôle social du postier... Pour que les choses soient claires, une manifestation est annoncée pour le 2 avril devant le siège régional de La Poste. Le conseil municipal de la localité de 670 habitants réguliers et 1 500 résidents secondaires s'est réuni et a unanimement promis de sauver le facteur Mallard.
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